BIENVENUE EN 2044
Présentée dans l’ouvrage “Les Utopiennes” des éditions de la Mer Salée, la carte de la France de 2044 que vous allez découvrir ici s’offre à vous en exclusivité… Préparez vous pour une excursion mémorable !
Bienvenue dans un futur où humains
et nature se sont réconciliés
Ces zones sont créées partout où la densité humaine est faible ou nulle et en 2044 et l’on peut dire qu’elles ont prouvé leur succès pour la régénération des espaces naturels, la bonne santé écologique des milieux et la protection de la biodiversité
L’ESPOIR RENAÎT
Loin de priver les français des paysages magnifiques du pays et de séparer humains et nature, ces espaces garantissent l’accès aux randonneurs, campeurs et voyageurs en tout genre à une nature préservée
France métropolitaine, 2024 : devant l’érosion de la biodiversité, l’étalement urbain et le changement climatique, les « Grandes Lois sur les Zones de Libre Évolution» sont appliquées à l’échelle Européenne. 20 ans plus tard, ces zones recouvrent presque 50% du territoire français…
La libre évolution consiste à favoriser la libre expression des processus écologiques. Elle vise à encourager le retour de processus naturels dans les écosystèmes et laisser la nature se développer spontanément: plus d'agriculture, d'activités extractives, d'urbanisation, de tourisme de masse...
CARTES POSTALES FRANCE - 2044
Parce que les mots ne suffisent parfois pas à projeter toute la force du futur, voici quelques images de la France dans 20 ans, telles que la voient les promeneurs marchant sur les nombreux sentiers pédestres ré-aménagés à travers le pays.
POPULATIONS
Cette “Zone de Libre Évolution” dont nous parlions. juste avant, qui recouvre près de 50% des 551 695 km² de la métropole, a ceci de particulier qu’elle est peuplée uniquement de communautés nomades et semi-nomades qui y vivent de manière sobre et minimale. Et le reste de la population française ? Elle se répartit sur l’autre moitié de la surface du pays. Ce nombre n’est pas le chiffre du hasard : les lois européennes ayant abouties à ce partage territorial se base sur la densité humaine. Là où elle est inférieure à 15 habitants par kilomètre carré, la zone devient un espace de libre évolution. Si la densité est supérieure, les gens restent et mathématiquement, la population s’y densifie. Nous y reviendrons plus tard.
Les principales communautés sont indiqués en bleu dans la carte ci-dessous,
2044 : C’est le retour des peuples racines en France.
Ces communautés qui représentaient 4% de l’humanité en 2024, sont aujourd’hui une centaine de milliers en France métropolitaine. Peuples nomades ou semi-nomades pratiquant chasse, cueillette, pastoralisme et “agriculture légère”, ils vivent en se déplaçant pour la plupart, à des rythmes différents selon leur géographie, géographie avec laquelle ils co-évoluent, plongeant métaphoriquement leurs membres dans les entrailles de la terre, pour y puiser de l’énergie, et dans le ciel, pour y chercher la lumière.
Maintenant, embarquons pour un petit tour de France de ces nouveaux peuples racines.
Les Cavaliers Marnois (Marne) et ceux du Midi (Occitanie) sont des sociétés équestres qui ont parfait la domestication du cheval pour parcourir les vastes étendues de leurs territoires autrefois dédiés à l’agriculture. Les Tribus du Béarn vivent en altitude à raison d’une tribu par vallée tandis que les Herboriens (Ariège) sont passés maîtres dans l’art d’utiliser les herbes et fleurs de leurs montagnes : on dit qu’ils ont une pharmacopée des plus complexes et fascinantes. Les Tribus du Pétale (Alpes Maritimes) confectionnent quant à eux d’exquis parfums aux notes entêtantes dont le sillage olfactif se répand bien au delà de leur territoire de libre évolution. Les Hortilloneurs (Somme) sont eux aussi des cultivateurs de fleurs de milieux humides, ensuite vendues dans tout le pays, personne ne pouvant rivaliser avec les formes et couleurs des fleurs dont ce peuple Picard a le secret. Les Immortels (Corse) ont trouvé dans la fleur corse éponyme une image forte au point d’en adopter le nom.
D’autres sont marcheurs ou coureurs, comme les Kerzheriens (dérivé de marcheur en Breton) mystérieuse société nomade du Centre-Bretagne dont les habitants arpentent inlassablement ces massifs vieux de millions d’années, tandis qu’à un rythme plus soutenu, on trouve les Coureurs des Vignes (Charente), chasseurs poursuivant leurs proies (lièvres et cervidés) dans les forêts de vignes, vestiges verdoyants de certains vignobles abandonnés.
Les Ligériens, Samariens et les Séquaniens sont eux des peuples dont les pratiques et identités sont intimement liées aux fleuves qu’ils habitent, le long des berges de la Loire, de la Somme et de la Seine, pêchant et cueillant au fil de l’eau. Toujours au bord de l’eau, des sociétés matrilinéaires et matriarcales ont vu le jour, comme les Femmes Nénuphars (Sologne) qui se distinguent par les rites de passages entre mère et filles au centre desquels les nénuphars jouent un rôle aussi symbolique que pratique : la plante est devenu un couvre chef fleuri -signe de statut dans la communauté- qui les camoufle lors de leurs chasses et pêches en eaux douces.
Certains nomades ont fait de leurs outils ou armes leur identité : les Faucilles de bronze (Lorraine) et les Bouclier d’Orme (Limousin) tirent leur matériaux de leurs régions respectives. Les sols riches en métaux de Lorraine et l’orme, arbre historique du Limousin, ont naturellement été exploités par les humains puis sublimés en objets au pouvoir poétique et symbolique fort, transmis de génération en génération, de mains en mains.
D’autres peuples quant à eux se définissent par les formes dominantes de leur environnement. La Communauté de l’Aiguille vit au pied du Mont Aiguille (Massif du Vercors) centre spirituel, politique et repère géographique de leur société nomade. Les Tribus des Marais (Marais Poitevin) sont lovées dans un monde vert, brumeux, humide et chantant, rempli d’oiseaux. Le Peuple de l’Horizon a pour ligne de vue perpétuelle ce vaste horizon que présente la Plaine Beauceronne (aujourd’hui une vaste lande sèche) et le Sud de l’Île de France. Dans le même registre, la Confrérie des Chênes (Champagne), tient son nom des vastes forêts qui ont grandi et prospéré dans les années suivant la restitution des terres à la nature. Il en va de même pour les Peuple des Sources, vivant autour des sources de la Loire…
MANGER
Dans un pays aussi différent, à la géographie aussi radicalement bouleversée, où vivent donc les dizaines de millions de français ? Quid des dizaines de millions d’hectares de terres agricoles “perdues” (ou plutôt restituées) à la nature ?
Pour mettre les choses en perspective, 0,2 hectares suffisent (en moyenne) à produire la nourriture consommée par une personne végétarienne, contre 1,2 hectare pour une personne consommant de la viande. La restitution de toutes ces terres à la nature imposera mathématiquement une évolution de nos régimes alimentaires qui devront placer les fruits, légumes, céréales, légumineuses et noix au centre de l’assiette.
Dans ce monde futur, il serait bien mal avisé de consacrer autant de place, des centaines de milliers d’hectares, à la production de maïs et autres fourrages à destination des élevages, alors que la surface agricole utile du pays a été largement réduite. C’est évident, les terres qui restent à notre disposition devront être consacrées à une agriculture plus végétale qui demande beaucoup moins de place et de ressources. Il en va de la sécurité alimentaire du pays.
2044 - Les berges de la Loire à Tours, où se trouvaient jadis échangeurs, parkings et hangars, ont été rendus à la nature, comme bien d’autres terres, pour recréer des zones humides, abriter une biodiversité foisonnante et atténuer les crues parfois dangereuses du fleuve.
“Labourer l’asphalte”
En parallèle, et toujours sur cette question alimentaires, les villes ont été repensées : plus denses, fonctionnelles, sobres et résilientes, on en sort rapidement pour rejoindre la nature. Les progrès de l’agriculture urbaine et la popularité de l’alimentation végétale ont rendu possible l’auto suffisance de certaines villes ou quartiers : hydroponie, serres, villes comestibles... Les rocades et parkings qui ont fleuri au vingtième siècle et fané dans les années 2020 et 2030 ont pour une grande partie d’entre eux été “labourés” pour révéler des terres aussitôt réhabilitées et mises en culture.
Observer
“Faire feu de tout bois,
faire fruit de toute terre”
… voici le slogan qu’on entendait alors dans toutes les métropoles du pays pour exhorter les habitants à retrousser leurs manches et récupérer ces espaces longtemps mal utilisés. Il est venu l’heure de l’optimisation tandis que celle du gaspillage s’achève
© Alona-Kovalevska | Getty Images
Pour finir, sur tout ce qui a changé, une chose qui n’a pas changé : les paysages français sont toujours magnifiques et plus que jamais, les habitants du pays veulent les parcourir à pied, à vélo, en kayak, à cheval. Pour cela, car l’accès a la nature doit rester un droit fondamental, de grands itinéraires de randonnée ont été conçus, pour voyager dans les zones de libre évolution et pour contenir les flux touristiques ( et donc limiter les perturbations liées au tourisme) tout en permettant la célébration de la nature et son respect.
Ma description de 2044 s’arrête ici. Le reste est entre vos mains !
Des centres de recherche en pleine nature (symbolisés par une paire de jumelles dans la carte) ont éclot à travers les zones de libre évolution pour suivre cette transformation géographique sans précédent et comprendre comment fonctionnent nos milieux naturels sans perturbation humaine, ou une pression largement amoindrie. Ces centres, qui s’apparentent à des îlots humains dans un océan de nature, sont remplis d’écologues, naturalistes, botanistes, zoologues etc. qui observent comment la vie végétale et animale reconquiert et réinvestit ces zones autrefois faiblement habitées par les humains et aujourd’hui redonnées à la nature.