ÎLOTS DE CHALEUR
Après midi à Seelampur, New Delhi. Température : frise les 40 degrés, sans doute plus, localement. Vu du ciel, le quartier est comme une carapace de béton qui ne laisse rien voir d’humain ou de végétal, juste une texture craquelée où l’on devine les rues.
Je franchis la Yamuna par le métro aérien pour atteindre l’arrêt de “Seelampur” et en quelques minutes, me voilà fraîchement débarqué quelques centaines de mètre au nord de ce quartier, dans cette atmosphère chaude et étouffante, dans le soleil de fin d’après midi, encore assez haut dans le ciel sous cette latitude.
Je marche quelques minutes de plus et je quitte le monde de lumière pour rentrer dans le monde de l’ombre : le quartier se matérialise avec force par une muraille d’immeubles de 4 ou 5 étages tous collés les uns aux autres, laissant tout juste la place aux gens pour circuler. La lumière n’a pas cette chance et les rues sont sombres, parfois criblées de flaques de boues, les piétons et scooters se fraient un chemin se faisant face mutuellement, les façades des nombres boutiques et ateliers sont dans la pénombre, comme l’un de ces très nombreux ateliers de textile qui ont presque l’air d’exister dans le secret, de produire des tissu qui sortiront de ce quartier pour habiller des gens n’ayant aucune idée de cet endroit.
Pour observer la réalité de ces quartiers où la chaleur emporte chaque année plusieurs milliers de vie en Inde quand elle frappe par vague, j’ai choisi ce quartier pour sa densité, son absence totale de verdure et sa pauvreté : tous les critères qui augmentent la température locales et la vulnérabilité à la chaleur. (expliquer comment ça marche)
Et en effet, ce que je vois, ce que je sens est une de mes expériences sensorielles les plus éprouvantes en Inde, même si le température à Delhi peut toucher les 45 degrés au pic de l’été, contre 38 et quelques ce jour ci.
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Au détour d’une boutique, j’engage la discussion avec un propriétaire de magasin pour savoir où il est possible d’accéder à un toit. Ayant marché pendant 20 minutes dans la pénombre, au sol et entre de hautes masses de béton sans ligne d’horizon au loin, je ressens le besoin de prendre de la hauteur pour voir de quoi cet endroit à l’air. Peut être un lointain instinct animal de monter en haut de l’arbre. 4 étages plus haut, de la lumière ! et comme l’espace coûte cher, aucun toit n’est épargné : ils sont tous mis à profit, utilisés et occupés de diverses manières. Cette verticalité me rappelle mes cours de géographie végétale où la professeur nous expliquait la course à la hauteur et donc à la lumière chez certaines plantes, en concurrence permanente pour ne pas être à l’ombre de plus grand que soi.